Trésor de juin 2016 : Deux curieux manuscrits ésotériques à la bibliothèque Thiers
Les “Convulsionnaires de Saint-Médard”
En 1713, la bulle pontificale Unigenitus met théoriquement fin à la controverse janséniste et à sa doctrine de la grâce et de la prédestination. Mais les thèses jansénistes continuent de prospérer auprès d’une partie de la population. En 1727, meurt le diacre janséniste Pâris. Sa tombe, près de l’église de Saint-Médard, réputée miraculeuse, devient l’objet d’un culte accompagné de scènes d’extases collectives et de convulsions. Par crainte du scandale, le gouvernement fait fermer le cimetière en 1732. Le mouvement dit des Convulsionnaires se poursuit alors dans des lieux privés, les séances se déroulant devant un public restreint. Les convulsions évoluent pour devenir de véritables scènes de tortures, le convulsionnaire, apparemment insensible à la douleur physique, réclamant aux assistants des « secours » sous forme de coups de poings ou de bâtons, percements à l’aide de clous, de lames de couteaux ou d’épées, pouvant aller jusqu’à la crucifixion. Ces séances s’accompagnent de discours pris en note par les assistants : visions, discours incohérents ou exprimés en langue étrangère (glossolalie), répétions de mots, prophéties… Ce mouvement, d’origine parisienne, vigoureusement combattu par l’Église officielle, s’étend en province à la fin du XVIIIe siècle : Lyon, Toulouse, le Forez… Il se ramifie en multiples branches avant de s’éteindre progressivement au milieu du XIXe siècle.
Le fonds Masson conserve deux manuscrits issus de ce mouvement ésotérique chrétien
- Le Ms Masson 704, intitulé « Rapports des principes et des vues de l’œuvre de manifestation des vérités anciennes et nouvelles dans l’économie préparatoire et prémices du Saint Esprit Troisième Personne, aux principes et aux vues que présentent les livres sacrés tant de l’Ancien que du Nouveau Testament pour l’intelligence du Grand Mystère de l’amour en Jeovah » est écrit entre 1806 et 1811. Il expose les grands principes de la doctrine, la vie de frères et sœurs notables en commençant par le diacre Pâris, et rapporte des séances de convulsions et de « secours ».
- Le second, Ms Masson 703, « Prédictions : 18 et 19 août 1808, an 16 de la République, jours de l’anniversaire de la naissance du St Prophète, sur les événements qui arriveront aux années 17, 18, 19, 20 et 21 de la République », rapporte des visions et prophéties émises pendant des séances qui s’étendirent du 13 juin au 31 août 1808.